Alphonse Piché : Poèmes (1946-1968)
Daniel Ducharme | Poésie | 2006, mise à jour : 2012-11-01
C’est en parcourant une anthologie (Laurent Mailhot et Pierre Nepveu, La poésie québécoise, Typo 1996) que j’ai découvert le poète Alphonse Piché. Dès les premières strophes, j’ai été séduit par les poèmes de cet auteur qui ont pour objet des questions de portée universelle comme les inégalités sociales, le sens de l’existence humaine, la vieillesse et la mort, etc.
Le présent ouvrage réunit les quatre premiers recueils de poèmes publiés par Alphonse Piché: Ballades de la petite extrace (1946), Remous (1947), Voies d’eau (1950) et Gangue (1968). C’est sans doute dans le premier recueil – Ballades de la petite extrace – qu’Alphonse Piché donne à ses poèmes une portée résolument sociale, prenant pour objet la vie difficile du petit peuple de Trois-Rivières à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Parmi les quelque quarante poèmes que compte ce recueil, citons La vie, Offrande, Prière, Les rues, En guerre, Les «Toppeux» et, bien sûr, Petite extrace, texte inaugural qui se termine par :
Pâles commis, menu fretin
Aux gros poissons les grandes eaux
Sachons rester dans le bassin
Aux petits chiens les petits os
Remous , le deuxième recueil, témoigne de la maturité du poète qui maîtrise de mieux en mieux son art. Il s’ouvre avec Bornes, un superbe poème qui débute par « Nous ignorons la paix étale de la plaine » et se termine par la strophe suivante :
Incline ton caprice, ô passant éphémère!
Sur l’arbuste tiré de la ronce et la nuit:
L’ombre qui dort en toi est la rosée amère
Qu’il lui faut assécher pour te livrer ses fruits
Quant au recueil intitulé Voies d’eau, la trentaine de poèmes qui le composent ont pour thème la méditation poétique d’un homme au fil de l’eau. Il s’agit en quelque sorte des poèmes maritimes d’Alphonse Piché qui ne dédaignait pas naviguer sur les eaux du Saint-Laurent. Enfin, dix-huit ans plus tard, l’auteur fait paraître Gangue, un petit recueil dont les poèmes sont plus obscurs, plus pessimistes aussi, des poèmes où les thèmes de la vieillesse et de la mort sont abordés en toute lucidité, l’auteur sachant pertinemment que la lutte contre la finitude s’avère un vain combat.
Bien que né à Chicoutimi en 1917, Alphonse Piché vit toute sa vie à Trois-Rivières où ses parents s’installent alors qu’il n’a pas encore deux ans. Après des études jamais complétées au séminaire Saint-Joseph de cette ville, il gagne sa vie en pratiquant divers métiers: commis de chantier, vendeur, comptable, agent d’assurances, etc. Mêlé très tôt au milieu littéraire local, il côtoie notamment les poètes Clément Marchand, Albert Tessier, Raymond Douville, Hervé Biron, Adrienne Choquette et Auguste Panneton. Il meurt en 1998 à l’âge de quatre-vingt et un ans. Son œuvre lui vaut de nombreux prix littéraires dont le Prix du Gouverneur général du Canada dès la parution de Poèmes (1946-1968) en 1976.
Outre les quatre recueils réunis dans Poèmes (1946-1968), Alphonse Piché a publié d’autres ouvrages dont Dernier profil (1982), Sursis (1987) et Néant fraternel (1991). Aucun site Web n’est entièrement consacré à ce poète, mais on trouvera des informations complémentaires en consultant Espace poétique, le site personnel de l’écrivaine Huguette Bertrand. Pour les mordus, on peut toujours se rendre au centre d’archives de Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Trois-Rivières où est conservé le fonds Alphonse Piché (P19).
Piché, Alphonse. Poèmes (1946-1968). Montréal, L’Hexagone, 1976