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Gilles Archambault : Vivre à feu doux (nouvelles)


Daniel Ducharme | Nouvelles | 2024-10-01


Depuis longtemps mon ami Pierre R m'encourage à lire des ouvrages de Gilles Archambault. Il prétend que mon style d'écriture, notamment dans mes nouvelles, s'avère calqué sur le sien. Alors, je me suis décidé enfin à lire un recueil de cet écrivain, animateur d'une émission de jazz à la radio de Radio-Canada au siècle dernier. J'aurais pu débuter par la lecture d'un ouvrage plus ancien, sans doute mieux maîtrisé sur le plan de la dynamique du récit, mais j'ai choisi son dernier, publié récemment alors que Gilles Archambault s'en va sur ses quatre-vingt-onze ans.

Vivre à feu doux comprend trente-deux nouvelles, et certaines ne font qu'une page et demi. Dans la plupart d'entre elles, un vieil homme pose un regard sans illusion sur le monde, un regard lucide, parfois dur, tout comme il le fait pour lui-même. C'est d'ailleurs ce qui le rend sympathique à mes yeux, cette critique teintée d'auto-dérision. Par exemple, il ne critique pas les jeunes comme certaines personnes âgés ont trop tendance à le faire. Non, il s'en prend à lui autant qu'à ce monde auquel il ne croit plus. Bien entendu, plusieurs de ces trente-deux textes portent sur la mort à venir, ce qui est bien normal pour un homme de quatre-vingt-dix ans qui sait mieux que quiconque que la grande faucheuse peut survenir n'importe quand, dans un an ou deux, dans trois ou quatre mois, cinq ou six semaines, voire d'ici huit à dix jours.

Une de ces nouvelles - La rentrée scolaire - qui relate la dernière pensée d'un homme mourant, porte sur ce sujet. Le narrateur compare la mort à l'enfant qui quitte le nid sécurisé du cocon familial pour se retrouver dans la jungle de la cour d'école. Est-ce sa vision de la mort ? Quitter un milieu sécurisé - la vie, quoi - pour affronter la mort, cette mer aux vagues incertaines sous un ciel agité ? Une vision assez juste puisque, dès qu'on quitte l'enfance, on commence à mourir en perdant son innocence. Dans des textes subséquents, l'auteur revient d'ailleurs sur cette vie qui s'avère loin de remplir ses promesses. En témoigne sa nouvelle intitulée La vie est effrayante.

Je ne sais pas si vous aimerez ce recueil de brèves nouvelles si vous avez moins de soixante ans. Compte tenu que je me considère moi-même comme une personne âgée, ces récits ont provoqué une certaine résonance en moi, comme l'appel familier de ce qui adviendra, tôt ou tard, dans ma vie : la finitude. Alors moi, je l'ai aimé, ce recueil, et j'ai pris beaucoup de plaisir à lire ces instants de vie, ces croquis du quotidien d'un homme dont l'unique projet est de lire et rêvasser dans un fauteuil. Et ce projet, je l'avoue, me ressemble assez...

Archambault, Gilles. Vivre à feux doux (nouvelles). Boréal, 2024


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