Lecture en cours

Lectures croisées : juin 2024


Sylvie Bellemare, Lyne DesRuisseaux, Pierre Rivet & Daniel Ducharme | Lectures croisées | 2024-07-02


Sylvie Bellemare

Blanchard, J. L. La femme papillon : Une enquête de Bonneau et Lamouche. Fides, 2024

La 4e enquête de ce duo improbable amène l’inspecteur Bonneau à Paris. Après avoir résolu une enquête impliquant le gouvernement français, l’inspecteur Bonneau est invité par le président à un court séjour et un dîner officiel. Dès son arrivée, Bonneau est kidnappé. Par qui? Pourquoi? Son assistant, Lamouche, est envoyé à Paris pour dénouer l’affaire. Une histoire mirobolante qui fait ressortir, encore une fois, l’intelligence et la finesse de Lamouche et le côté loufoque de Bonneau.

Chariandy, Davis. Mon frère / traduit par Christine Raguet. Héloptrope, 2024

Une suggestion de lecture de ma sœur. Dans la banlieue de Toronto, une cité avec des locataires immigrants, vivant de petits boulots, des gangs, la violence, etc. Michael vit avec sa mère que vient de Trinidad et qui élève ses deux enfants seules. Tout au long du roman, il est question de Francis, le fils aîné. Michael raconte son histoire, mélangeant les périodes récentes et plus anciennes. Un roman qui se lit vite et qui décrit une réalité que l’on a peine à imaginer ici.

Jannelle, Geneviève. Prendre son souffle. Québec Amérique, 2022

Une lecture recommandée par une amie. Une longue déclaration d’amour entre une femme et un homme atteint d’une maladie dégénérative. Partir pour ne pas voir l’homme de sa vie dépérir ? Rester et perdre soin de son amoureux au détriment de sa santé physique et mentale ? Voilà le choix que doit faire Anaïs. Un texte comme une longue lettre, touchant, bouleversant même, qui nous amène à réfléchir à notre façon d’agir si nous étions confronté à cette situation.

Picard, Isabelle. Nish. Les Malins, 2021-2024, 3 vol. (1 : Le Nord et le Sud ; 2) Les aurores boréales ; 3) L’été de tous les possibles)

En ce mois de juin : je lis autochtone, je m’en suis donné à cœur joie ! En attendant que le dernier livre d’Isabelle Picard, dont je parle plus bas, soit disponible à la bibliothèque numérique, j’ai lu ses trois romans jeunesse. Les jumeaux Léon et Éloïse vivent dans le village de Matimekush, près de Schefferville. Dans le premier tome, ils vivent leur vie d’adolescent (Léon joue au hockey et Éloïse fait des vidéos) jusqu’à ce que la maladie s’invite dans leur famille. Dans le 2e tome, la famille déménage à Wendake, près de Québec, pour permettre aux jeunes de poursuivre leurs études. Ils découvrent une nouvelle vie dans le Sud et doivent s’y adapter. Dans le 3e tome, ils reviennent dans leur village pour les vacances d’été et retrouvent leurs amis et la vie dans le Nord. Une équipe de tournage s’installe pour faire un film et les jeunes de la communauté sont les acteurs. Les jeunes lecteurs apprécieront ces livres qui font découvrir la vie et les valeurs des autochtones de façon simple et naturelle.

Picard, Isabelle. L’homme aux deux visages. Hannenorak, 2024

La collections Solstice des Éditions Hannenorak présente des textes courts. Celui-ci fait 50 pages et se lit en une journée. Un écrivain autochtone est en panne d’inspiration. Sa psy lui fait comprendre que c’est dans ses origines qu’il trouvera la solution à son problème. Il retourne donc dans sa communauté et y puise, auprès de ses proches et des ancêtres, l’énergie qui le ramènera à l’écriture. Une écriture sensible, fine, tantôt réaliste, tantôt onirique, qui ramène à la source des peuples autochtones.

Vargas, Fred. Temps glaciaires. Flammarion, 2015

Vargas, Fred. Quand sort la recluse. Flammarion, 2017

Des livres lus au hasard parmi ceux qui sont dans ma liseuse. Comme je n’ai pas lu toute l’œuvre de Vargas, je n’ai pas saisi certaines références aux enquêtes précédentes. Mais j’ai apprécié l’écriture singulière, les enquêtes pleines de rebondissements, les personnages pas toujours sympathiques, etc.

Vermette, Katherena. Ligne brisée / traduit par Mélissa Verreault. Québec Amérique, 2017

Un livre proposé par la bibliothèque numérique. L’autrice est originaire de l’Ouest canadien. Dans une réserve autochtone, une femme est témoin d’une agression. C’est l’hiver, la nuit, elle n’est pas certaine de ce qu’elle a vu, mais appelle la police. Un jeune policier zélé et un plus expérimenté et désabusé se présentent et mènent l’enquête. Chaque chapitre a le prénom d’une personne que l’on apprend à connaître et les détails de l’agression et les avancées de l’enquête sont dévoilés. On rencontre surtout les femmes d’une grande famille, sur quatre générations. L’autrice y décortique les liens entre elles et la vie dans une réserve. Un récit qui n’est jamais larmoyant.


Lyne DesRuisseaux

Namia , Dahlia.La société de provocation : essai sur l’obscénité des riches. Lux, 2023

Un essai-pamphlet qui mène une charge documentée sur les multiples stratégies indécentes d’appropriation du bien commun des extrêmement riches, au mépris de l’environnement, du respect et de la justice. Un livre souvent choquant qui montre le pire de l’humanité, hormis la guerre, soit le nombrilisme exhibitionniste et ostentatoire et l’insouciance crasse des milliardaires et multimilliardaires. Bien que fort documenté, j’ai un mini bémol sur le ton de cet ouvrage, à la lumière des pages sur la ferme écologique des Quatre temps, qui appartient au richissime André Desmarais. Il y a quelques raccourcis sur l’engagement du maraîcher Jean-Martin Fortier. Ce n’est pas parce que Fortier a été engagé par Desmarais qu’il faut laisser entendre que Fortier est un proche idéologique de Desmarais. Tout le monde a le droit de gagner sa vie et de travailler à changer les choses, même en étant au service des plus riches profiteurs. Ce livre a reçu le Prix Pierre-Vadeboncoeur et le Prix des libraires du Québec.

Ruel, Francine. Le promeneur de chèvres. Libre expression, 2021.

J’avais bien aimé Anna et l’enfant-vieillard, sur une mère qui peine à faire le deuil de son enfant devenu itinérant. Le promeneur de chèvres raconte l’histoire d’un jeune homme qui se retrouve à la rue pendant la pandémie, après avoir perdu blonde, emploi et logement. Son grand-père le retrouve et l’amène à sa ferme des Cantons-de-l’Est, où il élève des chèvres. Voilà un roman d’apprentissage où le jeune homme reprend plaisir à la vie au contact de ce grand-père aimant et un brin philosophe, duquel il devra éventuellement prendre soin. Mon intérêt était moyen au début, mais peu à peu j’ai apprécié l’évolution du personnage principal qui se réengage simplement dans le présent grâce à une profonde évolution intérieure.

J’écris fleuve / sous la direction de Vincent Lambert et Isabelle Miron. Leméac, 2015

Un recueil de plus de trente textes inspirés par le Saint-Laurent, contemporains pour la plupart, mais avec quelques rééditions. De Frédéric Back à Jean Sioui, en passant par Louise Dupré, Natasha Kanapé Fontaine, Pierre Nepveu et Pierre Perrault notamment, on y évoque la fragilité, la beauté, l’histoire et les menaces qui pèsent sur ce « chemin qui marche » ou Magtogoek en langue algonquine, constitutif de notre histoire et de notre identité. J’ai fort apprécié ce bel ouvrage, bien que j’ai sauté quelques textes (Michaël La Chance, Georges Leroux et Paul Chanel Malenfant). C’est le « droit de la lectrice ».


Daniel Ducharme

Le fait d'accompagner une personne malade dans ses rendez-vous médicaux a eu pour effet d'accroître sensiblement le nombre d'ouvrages lus en juin 2024. Ainsi ai-je procédé par couple : deux recueils de nouvelles (québécoises), deux romans français (Lemaître et Tong-Cuong), deux romans policiers (un français, l'autre anglais, bien que les deux intrigues se déroulent en Angleterre), et deux bandes dessinées. Le seul livre qui échappe à cette règle de deux est l'essai de Frédéric Lenoir, le troisième ouvrage de cet auteur lu au cours des deux ou trois dernières années. Donc, sept ouvrages, neuf si je compte les bandes dessinées. Je ne lis plus de romans policiers depuis quelques années, et ne me demandez pas pourquoi j'effectue ce retour... J'imagine que ça m'aide à me détendre.

Archambault, Gilles. Mes débuts dans l'éternité (nouvelles). Boréal, 2022

Lire les vingt-cinq nouvelles de ce recueil a été un ravissement, un moment de grâce. Souvent des histoires de personnes âgées, comme Vivre à feux doux, publié deux ans plus tard, mais en plus réfléchi si j'ose dire. Pour cette raison, je l'ai jugé supérieur, les textes nous faisant mieux ressentir le passage du temps.

Archambault, Gilles. Vivre à feux doux (nouvelles). Boréal, 2024

Vivre à feu doux comprend trente-deux nouvelles, et certaines ne font qu'une page et demi. Dans la plupart d'entre elles, un vieil homme pose un regard sans illusion sur le monde, un regard lucide, parfois dur, tout comme il le fait pour lui-même. C'est d'ailleurs ce qui le rend sympathique, cette critique teintée d'auto-dérision. À lire, surtout si vous avez plus de soixante ans.

Archer, Jeffrey. Qui ne tente rien (William Warwick 1) / traduit par Oscar Perrin. Les Escales, 2020

Une série "réaliste" décrivant le travail d'un jeune inspecteur de police à Scotland Yard. Un policier issu d'une bonne famille d'avocats et de juges. Rattaché à la section des enquêtes sur les biens culturels, l'auteur déploie William Warwick sur la scène londonienne. Mais pourquoi, bon sang, personne n'a de smartphone ? Le style de l'auteur est minimaliste, axé sur les dialogues. Et ses livres se vendent par millions, paraît-il.

Jacq, Christian. Les enquêtes de l'inspecteur Higgins 01 : Le crime de ma momie. J Éditions,c2011, 2016

Inspecteur à la retraite, Higgins reprend du service pour résoudre une affaire complexe à la demande de Scotland Yard : un égyptologue, son assistant, la gouvernante, le chauffeur, et une jeune femme, mal mariée, victime d'une machination cruelle. Un roman policier à l'ancienne avec tous les suspects réunis dans une apothéose finale. On aura compris qu'il s'agit de romans policiers dans le style des Agatha Christie et des Sherlock Holmes. Mais on s'y laisse prendre...

Lemaître, Pierre. Couleurs de l'incendie. Albin-Michel, 2018

La suite de Au revoir là-haut, deuxième volet des Enfants du désastre, une histoire qui déroule pendant les deux grandes guerres en France. Ici, nous suivons le destin de Madeleine Péricourt, la soeur d'Édouard Périncourt. Une histoire sordide, des gens qui n'hésiteront pas à dépouiller Madeleine à la mort de son père, mais une histoire avec des personnages lumineux aussi, comme Vladi et le petit Paul. Heureusement que ça finit bien...

Lenoir, Frédéric. L'Odyssée du sacré. Albin-Michel, 2023

Reprise à peine déguisée de son Traité d'histoire des religions (2014) que j'ai lu en 2017. À l'instar de Michel Onfray, ce philosophe un peu léger publie beaucoup de livres, sans doute trop pour qu'on les qualifie de sérieux. Certains y apprendront pas mal de choses malgré tout.

Tong Cuong, Valérie. Voltiges. Gallimard, 2024

Un roman polyphonique à quatre voix : Nora et Eddie, le couple, Leni, leur fille, et Jonah, l'entraîneur de celle-ci. Le roman tourne autour de l'humain, de leurs relations complexes, de cet sport méconnu (le tumbling, une gymnastique acrobatique), des dérèglements climatiques (pluie sécheresse, tornade, animaux sauvage en zone urbaine) et du jeu de la vérité et du mensonge. C'est certainement un beau roman écrit par une écrivaine souvent primée. Mais il faut aimer, quoi.

Bandes dessinées

Appolo & Huo-Chao-Si. La grippe coloniale. 2 vol. Vents d'Ouest, 2003

Du même scénariste que Chroniques du Léopard (Dargaud 2018), quatre militaires de la 1ère Guerre mondiale de retour à La Réunion où la vie tente de reprendre son cours. Malheureusement, la grippe espagnole frappe encore plus fort que la guerre... Très bien.


Pierre Rivet

Choinière, Olivier. La dernière cassette : Un portrait d’André Brassard. (théâtre). Atelier 10/Pièces, 2023

Très court texte (80 pages environ), il s’agit d’une pièce de théâtre où André Brassard est à la fois le personnage et le sujet. AB, malade, handicapé, seul et oublié, écoute des cassettes déjà enregistrées sur sa vie et ses idées, avant d’enregistrer la dernière. Cela donne le goût d’en connaître plus sur un des metteurs en scène le plus connu du théâtre québécois.

Cohen, Daniel. Une brève histoire de l’économie. Albin Michel, 2024

Juste avant son décès prématuré, l’économiste français Daniel Cohen avait l’idée de réaliser une bédé sur l’histoire de l’économie. Malheureusement, sa mort a mis un point final à son projet, mais les textes publiés d’une oeuvre inachevée nous permettent de nous faire une idée de son projet. Une façon simple et claire d’éclairer le mystérieux monde de l’économie.

Ernaux, Annie et Rose-Marie Lagrave. Une conversation. Éditions EHESS, 2023

Une conversation entre l’écrivaine Annie Ernaux et la sociologue Rose-Marie Lagrave. Toutes deux issues d’un milieu populaire de l’ouest de la France, elles nous font part de leurs visions du changement de classe, du féminisme, entre autres sujets. Très intéressant.

Fleury, Cynthia. Un été avec Jankélévitch. Éditions Équateur/France Inter, 2023

Un été avec Jankélévitch est à l’origine une série d’émissions diffusées pendant l’été 2022 sur France Inter. Cynthia Fleury est professeur titulaire de la chaire Humanités et santé du Conservatoire national des Arts et Métiers, titulaire de la chaire de philosophie au GHU Paris Psychiatrie et neurosciences. D’une façon claire et succincte, ce livre nous introduit à l’oeuvre, pas si simple, mais originale, du philosophe français Vladimir Jankélévitch.

Lacroix, Michel. Cécile et Marx : Héritages de liens et de luttes. Éditions Varia/Proses de combat, 2024

Toujours sur le sujet, très populaire ces temps-ci, des transfuges de classes, ce livre écrit par le professeur Michel Lacroix, venant d’une famille d’agriculteurs de la vallée du Richelieu, est cependant très différent de celui de Jean-Philippe Pleau. Partant d’un parallèle entre sa grand-mère Cécile et sa découverte de Karl Marx, l’auteur tisse des liens entre ses héritages de liens et de lutte. Beaucoup plus théorique et… verbeux (comme peuvent l’être les universitaire formés en études littéraire), ce livre comporte néanmoins des pages très intéressantes sur le féminisme, le marxisme, l’engagement, et les liens familiaux.

Laferrière, Dany. Un certain art de vivre. Boréal, 2024

Livre de courts texte, aphorismes ou haïkus, qui résument et éclairent l’oeuvre de Dany Laferrière. Quelques citations seront plus éclairantes qu’un impossible résumé : « Je rêve du jour où j’entrerai dans un livre / pour ne plus jamais en ressortir / mais il faut savoir dans quel livre on voudrait finir ses jours. » ; « C’est bien d’écrire un livre / mais c’est parfois mieux de ne pas le faire car / Chaque mauvais livre qu’on n’a pas écrit enrichit notre oeuvre. » ; « À force de s’occuper de la langue / on risque que d’oublier la parole / C’est-à-dire ce qu’on a à dire et pas seulement comment le dire. »

Péan, Stanley. Noir satin / préface de Gilles Archambault. Boréal/Liberté grande, 2024

En plus d’être écrivain, Stanley Péan est aussi, depuis longtemps, l’animateur d’une émission de jazz sur l’antenne de Radio-Canada/Espace Musique (c’est lui qui a pris la relève de Gilles Archambault à ce poste). Inévitablement la plume et le jazz se rejoignent souvent dans l’oeuvre de Stanley Péan. Dans ce livre, il reprend, avec l’ajout d’inédits, des articles écrits pour la revue L’Inconvénient, sur des jazz women injustement oubliées.

Porcher, Thomas. Traité d’économie hérétique : en finir avec le discours dominant. Fayard, 2018

Un économiste de gauche fait la lumière sur certaines idées issues du courant libéral dominant en économie, qui se retrouvent partout dans le discours des politiciens et des médias. La dette publique, le contrat de travail, les politiques sociales, etc., sont ici mis sous la lumière d’une économie « hérétique », afin de dénoncer les mythes de la pensée libérale. On parle de politiques économiques françaises, mais on peut facilement transposer cela dans le contexte québécois/canadien, car c’est tout le monde occidental qui a le même discours. Décapant et libérateur !

Rabagliati, Michel. Rose à l’île. Les Éditions de la Pastèque, 2023

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Roman graphique. Différent des albums de Paul par le traitement, puisqu’il ne s’agit pas un album de bédé mais d’un « roman graphique », on y retrouve par-contre la même poésie du quotidien dans cette histoire d’un père divorcé qui prend une semaine de vacance avec sa grande fille à l’île Verte. Très beau livre, très touchant.

Roche, Michel. La question nationale, une question sociale. Essai sur la crise du mouvement indépendantiste québécois. Liber, 2024

Professeur de science politique à l’Université du Québec à Chicoutimi, Michel Roche nous présente ici une étude fouillée des différentes politiques des gouvernements fédéral et provincial depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale pour nous démontrer le lien direct entre politiques sociales et nationalisme. Les politiques sociales créent de la solidarité entre les membres d’une nation, ce faisant elles favorisent le sentiment national inclusif et rassembleur. Dans un pays en devenir comme le Québec, cela signifie une montée de l’indépendantisme ou, si le gouvernement applique plutôt des politiques néolibérales, un repli sur un nationalisme de type conservateur et identitaire. Très intéressante lecture.

Wolf, Eric. R. L’Europe et l’histoire des sans-histoire. Un nouveau récit de la colonisation du monde. Écosociété, 2023

L’oeuvre monumentale d’un anthropologue américain d’origine autrichienne traduite en français pour la première fois. Peut-on sortir d’une vision eurocentrée de l’histoire du monde ? Dans cet ambitieux projet qui couvre l’histoire depuis 1400, l’anthropologue Eric R. Wolf nous invite à penser l’expansion coloniale puis l’essor du capitalisme à travers un enchevêtrement d’histoires locales et de processus interconnectés. De fait, les expéditions européennes lancées à partir du XVe siècle s’insèrent dans de vastes réseaux économiques et politiques déjà structurés entre le Proche-Orient, l’Asie et l’Afrique, mais aussi dans les Amériques et en Océanie. Ces contacts donneront forme aux pouvoirs, violences et résistances qui vont se déployer par la suite dans le monde colonial. Ruée vers l’or en Amérique du Sud, traite des fourrures en Amérique du Nord, esclavagisme en Afrique, quête de nouvelles richesses en Asie… Dans ce récit vivant, Wolf analyse les rapports de domination qui se jouent à l’échelle des populations locales aussi bien qu’au niveau mondial, dans un constant aller-retour entre le centre et la périphérie qui fait la force et l’originalité de son regard. Il analyse également les effets du capitalisme sur la formation des classes ouvrières et leurs migrations.


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